Aller au contenu principal

Albert Meyer, de la Ligne Maginot à Buchenwald

  • Usage pédagogique Usage pédagogique
  • Date du document : 1939-1940
  • Référence : Archives privées d'Evelyne Kahn
  • Lieu(x) : Alençon , Buchenwald (Allemagne)
  • Période(s) : De 1914 à nos jours
  • Type(s) de document : Photographie

Présentation :

Albert Meyer entre dans la famille Kahn/Bonnem par son mariage avec la cadette, Lilli (Germaine) Kahn, en 1938. Ils se sont sans doute rencontrés par le biais de Siegmund Friedemann, mari de Hertha, la grande sœur de Lilli. Après leur départ de la Sarre, Siegmund avait été embauché par la communauté juive de Saverne comme professeur de Kodesh (étude de la Torah) et  sacrificateur rituel (Cho’het). Il avait formé une chorale où chantait Albert.

Le mariage a lieu à Saverne ; c’est Siegmund qui officie. Le couple s’installe ensuite à Sarrebourg (Moselle). On peut lire sur les fiches d’internement rédigées par l’administration allemande qu’Albert était alors « nähmaschinen-mechaniker », ce que l’on peut traduire par réparateur de machines à coudre.

Albert est français ; à l’entrée en guerre, il est mobilisé dans le 23e Régiment d’Infanterie. C’est dans son uniforme qu’il apparaît sur cette photographie, prise entre septembre 39 et le printemps 40, et issue des archives privées d’Evelyne Kahn. Pendant la « Drôle de guerre », le 23e Régiment d’Infanterie est affecté sur la Ligne Maginot dans le secteur fortifié de Haguenau (Alsace).

Après l’armistice, Albert parvient à échapper à la captivité et à rejoindre son épouse et le reste de la famille réfugiés à Alençon. Pendant quelques mois, il travaille dans le commerce de ses beaux-frères Edgard et Alfred, qui ont été affectés dans des camps de travailleurs étrangers en zone sud. Lilli et Rosa, l’épouse d’Alfred, travaillent avec lui.

En janvier 1941, c’est la catastrophe : lors d’une discussion avec des soldats allemands, Alfred a l’imprudence de dire du mal d'Hitler et du régime nazi. Dénoncé, il est arrêté le 16 janvier, condamné à trois ans de détention pour « propagande anti-allemande » et transféré à la prison de Caen, puis à Villeneuve-Saint-Georges (Val-de-Marne).

En septembre 42, il est sans doute encore à Villeneuve-Saint-Georges. D’après les documents allemands transmis par le Centre des Archives de Bad-Arolsen, il est ensuite transféré dans la forteresse de Rheinbach, au Sud Ouest de Bonn (Rhénanie). La plupart des détenus sont des prisonniers politiques. Pour Albert, c’est le début d’un épouvantable périple à travers le système concentrationnaire nazi.

Le 21 janvier 1943, on le transfère dans la prison de Siegburg (Rhénanie), un autre bagne réputé pour sa dureté. D’après les sources allemandes, il y reste jusqu’au mois d’août 44 où il est alors déporté à Auschwitz. Face à l’avancée des Alliés à l’Ouest, les Allemands procèdent alors à l’évacuation de leurs prisonniers vers l’Est.

Mais Auschwitz est surpeuplé. A la fin du mois d’octobre 44, Alfred est de nouveau transféré, cette fois au camp du Stuthoff. C’est le premier camp de concentration installé en Pologne, pas très loin de Gdansk. Puis un nouveau transfert le conduit à Buchenwald où arrivent, toujours plus nombreux, les survivants des marches de la mort évacués des camps de l’Est face à l’avancée de l’Armée Rouge.

Créé en 1937, non loin de Weimar, Buchenwald est l’un des premiers camps de concentration ouvert par les nazis pour y enfermer d’abord les opposants politiques allemands, les juifs, les homosexuels, les Roms, les témoins de Jéhovah, bref tous ceux que l’idéologie nazie considère comme dangereux ou étrangers au « corps national » aryen. A mesure que le Reich s’agrandit, les nazis y enferment aussi les opposants capturés dans les territoires occupés et des prisonniers de guerre soviétiques. A la fin de l’année 1944, des prisonniers venus de tous les camps du Reich y sont entassés, dans des conditions épouvantables.

Epuisé par plus de trois terribles années de détention dans les bagnes nazis, Albert ne survit pas longtemps à Buchenwald. D’après les sources allemandes, il meurt de septicémie le 8 décembre 1944. Il allait avoir 36 ans.