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La gare de L'Aigle et la ligne Paris-Granville

  • Usage pédagogique Usage pédagogique
  • Date du document : premier quart du XXe siècle
  • Référence : 22 Fi 2240
  • Auteur(s) : Eugène Pasquis
  • Lieu(x) : L'Aigle
  • Période(s) : De 1815 à 1914 , De 1914 à nos jours
  • Type(s) de document : Photographie

Présentation :

Cette photographie de la gare de l’Aigle, prise par le photographe Eugène Paquis au début du XXe siècle permet d’évoquer à la fois la naissance des gares et la ligne Paris-Granville, mise en service entre 1864 et 1867.

Dans les villes et villages traversés par le train apparaît donc un lieu nouveau, la gare, appelé à jouer un rôle majeur aussi bien dans le rapport à l’espace des populations que dans l’économie et dans l’imaginaire. N’oublions pas que lorsque se développe le réseau ferré, l’automobile n’existe pas encore. Le train permet donc une contraction spectaculaire de l’espace vécu. Quelques heures suffisent désormais à franchir des distances qui parfois nécessitaient auparavant plusieurs jours de voyage. Ce rétrécissement du monde constitue une ouverture culturelle et contribue également à l’unification de la nation. Il offre aussi des opportunités économiques nouvelles : les marchés s’agrandissent, les marchandises circulent davantage. Comme une porte ouverte sur le monde, la gare est aussi un lieu marqué par une grande charge affective, celle des séparations et des retrouvailles sur les quais. La littérature et la peinture exploitent d’ailleurs tout cet imaginaire nouveau qui se développe autour des trains, des gares et des voies ferrées.

Photographiée ici depuis les quais, la gare de l’Aigle a été inaugurée le 1er octobre 1866 lors de l’ouverture du tronçon Dreux-L’Aigle de la ligne Paris-Granville. La construction de cette ligne est décidée en 1855 afin d’ouvrir une troisième radiale entre Paris-Cherbourg au Nord et Paris-Rennes au Sud. Après les phases d’étude et les inévitables difficultés liées à l’expropriation des terrains, les travaux commencent en 1860. Comme les autres lignes du Nord-Ouest, elle est exploitée par la Compagnie des chemins de fer de l’Ouest, créée en 1855. Depuis l’Aigle, elle permet de rejoindre Paris en quatre heures et quart en omnibus (quatre fois par jour), ou plus vite encore par les deux trains express quotidiens. En un peu plus de six heures, elle atteint Argentan et Alençon, via une connexion à Surdon sur la ligne transversale Le Mans-Mézidon achevée en 1859. Et il faut huit heures en express ou douze heures en omnibus pour aller de Paris à Granville.

Cette nouvelle ligne permet d’exporter les productions agricoles des régions traversées mais elle a aussi joué un rôle dans l’essor de la métallurgie de la vallée de la Risle et de l’industrie textile du Bocage (voir dans ce dossier les chapitres correspondants). Elle a également fortement contribué à l’essor du tourisme en Basse-Normandie : tourisme thermal d’abord avec l’ouverture en 1869, d’un embranchement Briouze-La Ferté Macé pour desservir la station de Bagnoles en plein essor, et tourisme littoral : en 1878, la Compagnie des chemins de fer de l’Ouest lance les « trains de plaisir » pour inciter la bourgeoisie parisienne à découvrir la côte du Sud Manche.

Notons pour terminer que sur cette ligne se produisirent deux accidents majeurs : le premier entre Flers et Montsecret en 1879 (voir le document dans ce chapitre), le second en 1895 à Paris, immortalisé par une célèbre photographie, lorsque la locomotive après avoir traversé le mur de la gare termina sa course sur le boulevard Montparnasse en contrebas.