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Bernard Jardin, un collaborationniste au service de la persécution des résistants ornais

  • Usage pédagogique Usage pédagogique
  • Date du document : avril 1946
  • Référence : 533 W 14
  • Auteur(s) : commissaire du gouvernement de la Cour de justice de l'Orne
  • Période(s) : De 1914 à nos jours

Présentation :

Le document présenté expose les faits reprochés à Bernard Jardin, qui à partir d’avril 1944, s’est mis au service de la gestapo (Geheime Staat Polizei), la police politique du régime nazi. Ce document est destiné à motiver le renvoi de Jardin devant la Cour de justice de l’Orne. Les cours de justice sont créées dans chaque département en juin 1944 par une ordonnance du Gouvernement Provisoire de la République Française (GPRF). Ce sont des juridictions pénales qui doivent juger les affaires liées à la collaboration. Le document est rédigé par le commissaire du gouvernement qui, dans ce contexte, joue un rôle équivalent à celui d’un procureur, représentant du ministère public. L’intégralité du document est disponible en version pdf par le lien ci-dessus.

Né en 1920 à Argentan, Bernard Jardin peut être considéré comme le pire des collaborateurs de l’Orne. Dès 1942, il adhère au Mouvement Social Révolutionnaire (MSR), fondé par Eugène Deloncle à Paris en 1940. C’est un groupement d’extrême droite, d’inspiration fasciste, antisémite et anticommuniste. En 1944, Jardin lui préfère le Parti Populaire Français (PPF) de Jacques Doriot, qui est aussi le créateur de la Légion des Volontaires français contre le bolchevisme (LVF). Jardin a des convictions sans doute mais c’est aussi un petit malfrat opportuniste qui profite de son emploi de commis dans une boucherie d’Argentan pour se livrer au trafic de viande. Arrêté pour cette raison en décembre 42, il est passe quelques mois en prison jusqu’en mars 43 puis il est envoyé en Allemagne dans le cadre du Service du Travail Obligatoire. Il revient dans l’Orne en novembre 43 et se met alors au service des autorités d’occupation comme chauffeur à Alençon. En avril 1944, il est de nouveau arrêté, mais cette fois par Hildebrand, chef de la gestapo dans l’Orne, pour un trafic de cartes de rationnement. Hildebrand, qui connaît ses idées, lui propose de passer l’éponge à condition qu’il travaille pour la gestapo et l'aide à pourchasser les résistants du département. Jardin se révèle redoutablement efficace dans ses nouvelles fonctions et devient ainsi l’homme de confiance de Hildebrand.

Le document établit la chronologie des actions menées par Jardin et ses hommes, parmi lesquels se trouve notamment Eugène Duru, tout aussi redoutable. D’avril à août 1944, ils sillonnent sans relâche le département et multiplient les opérations : arrestations, torture, assassinats, sans oublier les vols car Jardin ne néglige pas ses intérêts personnels. La liste de ses méfaits présentée ici est effrayante et illustre de manière saisissante la répression qui s’abat sur la Résistance dans le département. Parmi les 60 faits exposés, on peut relever notamment l’arrestation de Daniel Desmeulles, le chef des FFI de l’Orne, le 13 juin 1944, lors de l’attaque du maquis de Liginères-la-Doucelle (Mayenne). Il est aussi impliqué dans le massacre de 5 résistants à l’Hôme-Chamondot (François Bouilhac, Fernand Chasseguet, Alfred Frémiot, Jean Mazeline et Jean Moreau) le 9 août 1944.

En août 1944, Jardin quitte l’Orne avec les Allemands mais reste à leur service. Il est arrêté en Italie à Mérano en septembre 1945 et ramené à Alençon. Son procès devant la Cour Spéciale de Justice s’ouvre le 10 avril 1946, quelques jours après la production de ce document. Jardin reconnaît les faits et revendique ses idées. Malgré la défense de l’avocat Isorni, qui avait également défendu le Maréchal Pétain, il est condamné à mort et exécuté le 17 août 1946.

  • Exposé des motifs d'inculpation de Jardin 553W14_compressed.pdf

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