L'arrestation d'Edgard Kahn à Lavelanet

Présentation :

Edgard Kahn, né le 12 octobre 1907 à Merzig (Sarre), est le quatrième enfant de Julius et Ida Kahn. En 1935, après le référendum en faveur de l’annexion de la Sarre à l’Allemagne, tandis que ses parents et son frère Alfred se réfugient en France, il part pour la Palestine avec son épouse Liesel, sans doute en même temps que sa grande sœur Gustel, son mari Marcel Bonnem et leurs trois enfants. C’est là, en 1936, que naît sa première fille, Berthie. Cependant, on a vu que cette tentative d’installation en Palestine fut un échec. Edgard, Liesel et les Bonnem préfèrent rejoindre le reste de la famille à Alençon ; ainsi, en 1938, Edgard est enregistré au tribunal de commerce d’Alençon comme associé de son frère Alfred (voir les documents dans ce dossier).

Au printemps 1940, Edgard, Alfred et son beau-frère Marcel, tous réfugiés sarrois, sont internés en tant que ressortissants de pays ennemi. Ils sont d’abord détenus dans le camp de Funay au Mans (Sarthe), et enrôlés au service de l’armée française, puis transférés en zone libre après l’armistice dans le cadre des Compagnies de Travailleurs Etrangers, puis Groupes de Travailleurs Etrangers.

En août 1940, son épouse Liesel (Théa) et sa fille gagnent la zone libre. Elles s’installent à Lavelanet (Ariège). Selon le journal d’Ida Kahn, sa mère, restée à Alençon, Edgard parvient alors à se faire « muter » à Lavelanet. On ne sait pas très bien quand il parvient à être libéré de ses obligations de travailleur étranger. Quoi qu’il en soit, il est enregistré par la préfecture de l’Ariège comme juif sarrois avec Liesel, tous deux domiciliés à Lavelanet, rue des Moulines, puis rue Saint-Jean, au moins à partir de juillet 1941. Il travaille alors comme manœuvre pour l’entreprise de bâtiments Costa, comme le raconte Hermance Eychenne, sa voisine, dans le document présenté ici.

A partir de novembre 1942, l’armée allemande occupe la totalité du territoire français et les persécutions s’étendent. Le 18 février 1943, les Allemands imposent la déportation et l’arrestation de 2000 juifs en représailles de l’assassinat à Paris, le 13 février, de deux officiers de la Luftwaffe. Ce sont surtout des juifs étrangers qui sont arrêtés, encore une fois à l’aide des recensements réalisés par les préfectures. Entre le 18 et le 23 février, 1778 juifs sont ainsi arrêtés, puis transférés au camp de Gurs, et enfin à Drancy. Edgard est parmi eux.

Le document est le procès-verbal de l’audition d’Hermance Eychenne réalisée en février 1962 dans le cadre d’une enquête menée à la demande du préfet de l’Ariège concernant les « résistants politiques ». Il est conservé par les Archives départementales de l’Ariège. Hermance Eychenne rapporte qu’Edgard a été arrêté par un gendarme français alors que sa femme était enceinte de leur deuxième enfant, Evelyne, qui naîtra quelques jours après, le 26 février. Alfred Kahn, le grand-frère d'Edgard, racontera plus tard que Liesel avait supplié le gendarme de faire comme s’il n’avait pas trouvé Edgard ; mais celui-ci avait répondu qu’il craignait de perdre son poste.

Edgard est transféré à Drancy le 28 février (voir document dans ce dossier), puis déporté le 4 mars par le convoi n° 50 dans le camp d’extermination de Majdanek (Pologne), où il est assassiné. Quelques jours avant, sa sœur Lilli avait été déportée de Drancy vers Auschwitz (convoi n° 48 ; voir document dans ce dossier).

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