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La remise en question de la laïcité

  • Période(s) : De 1914 à nos jours
Si le régime de Vichy rassemble des sensibilités unies par le rejet de la République, l’idéologie d’ensemble reste assez confuse et les désaccords sont nombreux dans plusieurs domaines. Ainsi, la question de l’influence de l’Eglise dans la société fait débat. A Vichy, on s’accorde à accuser l’école républicaine d’être en partie responsable de la défaite mais faut-il pour autant revenir sur la laïcité ? Les conservateurs du régime y sont favorables mais se heurtent au camp anticlérical. Les documents présentés dans ce chapitre permettent de montrer les hésitations du régime à travers l’exemple de la question du crucifix dans les salles de classes.

Pour les plus conservateurs du régime, et notamment le ministre de l’Instruction publique Jacques Chevalier (du 11 septembre au 13 décembre 40), Vichy est l’occasion de prendre une revanche ; dans le contexte de la défaite, ils sont soutenus par une partie de l’opinion publique qui estime que la République sans dieu est responsable de la catastrophe du printemps. Selon eux, l’école laïque porte une responsabilité toute particulière. A l’automne 1940, ils obtiennent des succès qui tendent à restreindre la séparation de l’Eglise et de l’Etat. Ainsi, par exemple, les congrégations religieuses reçoivent de nouveau le droit d’enseigner, les collectivités locales peuvent subventionner les écoles catholiques et on réintroduit dans les programmes du primaire la notion des « devoirs envers dieu ». En janvier 41, l’instruction religieuse devient une matière optionnelle, ce qui ouvre aux prêtres les portes de l’école.

Mais l’arrivée de Darlan à la tête du gouvernement en février 1941 modifie la situation. Soutenu par une grande partie de l’opinion, y compris parmi les partisans du régime, il affirme clairement son hostilité à l’influence de l’Eglise. Dans le domaine scolaire, Jérôme Carcopino, secrétaire d’Etat à l’Instruction publique dans son gouvernement, modère donc les décisions de l’automne 1940.

C’est dans ce contexte que se pose la question du rétablissement dans les écoles des crucifix qui en avaient été retirés (en principe) suite aux lois Ferry. Au printemps 1941, dans de nombreuses communes, les conseils municipaux décident de replacer des crucifix dans les salles de classe et/ou dans les mairies. Darlan y est d’abord hostile mais doit modérer son opposition devant l’ampleur du phénomène. En juillet 41, il opte pour une position qu’il veut consensuelle : les communes peuvent rétablir le crucifix à condition que cette décision soit le fruit d’une opinion majoritaire. La politique de Vichy en la matière est donc hésitante, par crainte de rallumer la guerre scolaire. Les documents présentés dans ce chapitre mettent en évidence ces hésitations et ces prudences.

Rappelons que, sur ce thème, les documents présentés ne sont qu’un échantillon du fonds des Archives ; on dispose de nombreux courriers adressés par les communes à la préfecture pour faire part de leurs décisions. Les professeurs intéressés peuvent donc nous solliciter pour travailler à partir d’exemples locaux.